La narration (l’ellipse), le paysage (l’espace), l’autoreprésentation (la figure) et, plus récemment, la notion d’histoire (le parcours dans le temps) constituent les grands axes de ma proposition artistique. Formellement, conceptuellement, je me suis toujours intéressée à la mise en abîme des images, aux recoupements temporels, aux recadrages, aux énumérations conflictuelles et à la réinterprétation des traditions photographiques. Je considère le mouvement arrêté et l’espace fictionnel (le flottement, la répétition, et puis la superposition, le son, les mots…) comme vraiment essentiels dans la perception de l’image photographique. L’attention, la fascination, l’hésitation à choisir et à écarter, la variation, la redite et l’impossibilité de vraiment transmettre l’expérience vécue sont aussi des données incontournables de cette pratique. Mon travail actuel évolue le long de ces axes ; tour à tour, je deviens cinéaste, je fais de la vidéo et je découvre le monde sonore comme une suite naturelle à mon parcours. Et voilà que soudain je réalise combien je suis déjà engagée dans la constellation — ou le labyrinthe — numérique, sans l’avoir vraiment décidé. Avec le peu de connaissances dont je dispose, je m’engage à tâtons dans cet espace d’incertitude.
Raymonde April,
extrait de « Le tragique du temps »,
Spirale no 188
Les images suivantes sont issues d'un projet réalisé en 1999 pour le CHSLD de Terrebonne. Il s'agit d'une collection construite en additionnant des images de différentes provenances. Des images trouvées : cartes postales reçues ou achetées sur les lieux des voyages; illustrations et motifs décoratifs recueillis dans des magazines ; bribes de reproductions d'œuvres d'art ramassées dans des vieux livres achetés aux Puces. Puis des photos héritées de ma famille et puis celles que mes parents avaient gardées, pas toujours religieusement, de leurs propres familles… Certaines de ces images sont comme des vieilles connaissances; plusieurs d'entre elles sont littéralement en train de s'effacer. J'ai ensuite regardé mes propres négatifs et complété des ensembles.