Tempus fugit

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Spirale fêtera cet automne son trente-cinquième anniversaire, ce qui n’est pas rien pour un magazine culturel, ce qui, en fait, est même remarquable, il faut bien l’avouer, quand un tel magazine voit le jour et survit, année après année, dans une société qui, au fond, ne fait grand cas ni d’un magazine comme Spirale ni de la « culture » dont il s’évertue malgré tout à être l’un des porte-voix. Que la classe politique ait peu ou n’ait pas du tout parlé de culture au cours de la dernière campagne électorale, il faut, bien entendu, encore une fois s’en désoler, mais est-ce vraiment étonnant ? Dans un récent billet, Marc Cassivi, comme tant d’autres avant lui, s’en prenait au « discours dominant qui sous-estime l’importance de la culture » (« Ce qu’il reste de nous », La Presse, 20 mars 2014). « Qu’un parti politique, écrivait-il, puisse tirer avantage de la promesse électorale d’annuler un investissement important dans les arts en dit long sur nous. Sur notre incapacité à faire la preuve de l’importance de la pérennité de notre culture. » 

Cette réflexion sur la place de la culture dans notre société, cent fois entamée, cent fois menée, me semble chaque fois nous contraindre au même implacable constat : « Nous avons failli à la tâche de transmettre non seulement la culture, mais le goût de la culture », comme l’écrivait encore Cassivi, et sans doute est-il vrai qu’il nous faut, tous autant que nous sommes, prendre sur nous cet échec collectif. Notre responsabilité face à ce désastre, dont le spectacle est quotidien, me semble telle qu’il m’arrive d’en désespérer, oubliant, l’espace de quelques instants, que Spirale, malgré tout, aura bientôt trente-cinq ans et que cela, oui, vraiment, est remarquable. Remarquable parce que, malgré la lourdeur de la responsabilité qui leur incombe, nombreux sont ceux et celles — ils sont légion — qui persistent et s’acharnent néanmoins, quand bien même en vain, « à faire la preuve de l’importance de la pérennité de notre culture », ce qui n’est pas rien, ce qui, peut-être, est en fait tout ce qui nous empêche de sombrer plus avant dans le désespoir auquel nous convie quotidiennement le spectacle de cet échec collectif. C’est dire, en somme, qu’ils et elles ménagent en notre nom une place pour l’espoir.

C’est à ce titre que l’on me permettra, je l’espère, de saluer et de souligner ici vivement le travail exemplaire et l’implication généreuse de Stéphan Gibeault, de Sylvie Lacerte et de Jean-Michel Sivry qui, hélas, quittent l’équipe de Spirale dont ils font partie depuis tant d’années. S’il m’est impossible de rendre justice à l’importance de leur apport au magazine, je tiens néanmoins à dire combien ils ont été appréciés de leurs collègues et amis, et combien leur départ nous attriste. 

Stéphan Gibeault s’est joint à l’équipe de Spirale à titre de secrétaire de rédaction dès le mois de mars 2000 (no 171) pour ensuite devenir membre du comité de rédaction en juillet 2002 (no 185). Cela fait donc quatorze ans que Spiralepeut invariablement compter sur son engagement et son dévouement. Dresser ici la liste des articles et des dossiers qu’il a signés ou dirigés me semblerait une bien pauvre façon de témoigner de l’apport de celui qui a incarné la « mémoire vivante » du magazine pendant de si nombreuses années et dont l’implication dans son fonctionnement est, justement, exemplaire des raisons pour lesquelles Spirale pourra, cet automne, souffler ses trente-cinq bougies.

Sylvie Lacerte a, quant à elle, assumé la direction artistique du magazine au moment où Spirale parachevait sa refonte graphique. Depuis le numéro de mars-avril 2010 (no 231), elle a su mettre en valeur la nouvelle signature visuelle des portfolios de Spirale, conviant nos lecteurs et nos lectrices à la (re)découverte de dix-huit artistes québécois, établis ou de la relève, et signant la présentation de nombre d’entre eux dans un style qui, toujours, invitait à l’exploration de leur travail artistique. En somme, depuis quatre ans, elle a, de brillante façon, su donner à Spirale une véritable et nécessaire « direction » artistique, signature personnelle dont nous ne pouvons que lui être reconnaissants.

Quant à Jean-Michel Sivry, il quitte, hélas, la présidence du comité d’administration de Spirale auquel il s’est joint en 2007. Aujourd’hui retraité de Flammarion Québec, dont il était le président/directeur général, il a su veiller, de la manière la plus amicale et la plus généreuse qui soit, au développement et à la pérennité du magazine. Je ne saurais dire, là encore, combien sa présence chaleureuse, son engagement et sa sollicitude ont été appréciés par ses collègues et amis.Il va sans dire que tous trois nous manqueront beaucoup.

RENCONTRE ANNUELLE DU MAGAZINE

Comme nous le répétons chaque année, la rencontre printanière de Spirale est une tradition que nous maintenons avec plaisir. Si nous profitons de l’occasion pour souligner la parution de notre plus récent numéro et pour annoncer les finalistes du Prix Spirale Eva-Le-Grand, cet événement nous permet surtout de rencontrer nos collaborateurs et collaboratrices, ainsi que nos lecteurs et lectrices qui sont aussi tous conviés à cette petite fête. L’occasion est surtout belle de célébrer et de lever nos verres à la santé de tous ceux et celles qui rendent possible, aujourd’hui, une improbable aventure comme celle de Spirale ; il nous est, malheureusement, trop rarement donné de le faire et il va de soi, cette année, que nous soulignerons le départ de Stéphan Gibeault, de Sylvie Lacerte et de Jean-Michel Sivry. Cette année encore, la rencontre aura lieu à la Librairie Olivieri à la fin du mois de mai ou au début du mois de juin. Pour la deuxième fois, nous y dévoilerons également le/la lauréat(e) du Prix de la critique émergente dont le concours a été relancé en janvier dernier. La date reste à préciser, mais comme toujours, nous en ferons notamment l’annonce dans les pages du Devoir et sur la page Facebook du magazine. Nous vous invitons bien entendu à communiquer avec le secrétariat de Spirale pour nous faire part de votre adresse courriel si vous souhaitez faire partie de notre liste et être tenus informés de toutes nos activités.

AVIS IMPORTANT À NOS LECTEURS ET LECTRICES

La parution de notre numéro de printemps marque un important changement dans la distribution du magazine. Après plusieurs années de partenariat, Spirale a en effet mis un terme, cet hiver, à l’entente qui le liait à son distributeur LMPI (Les Maisons de la Presse Internationale). Il nous fait donc grand plaisir d’annoncer que le magazine sera désormais distribué par Gallimard Ltée, qui a accueilli Spirale avec un enthousiasme très encourageant. Notre présence dans les librairies du Québec n’en sera qu’accrue. Si, toutefois, il s’avérait que le magazine n’était plus distribué dans certains kiosques où nos lecteurs et nos lectrices étaient habitués de retrouver Spirale, nous vous invitons simplement à communiquer avec nous afin que nous puissions vous informer du point de vente le plus près.

SPIRALE DONNE À PENSER

La sortie du présent numéro marque également le retour de notre campagne d’abonnement. Nous encourageons donc de nouveau tous ceux et celles qu’intéresse le projet critique du magazine à en profiter dès à présent. Grâce à l’appui et au soutien des Éditions Nota bene, partenaire fidèle depuis 2004, tout(e) nouvel(le) abonné(e) pourra choisir et recevoir en prime deux titres de notre collection « Nouveaux Essais Spirale » (jusqu’à épuisement des stocks). Les quantités étant limitées, nous invitons donc nos lecteurs et nos lectrices à prendre rapidement connaissance des détails de cette offre sur le site du magazine sous l’onglet « Abonnement » (www.spiralemagazine.com) ou sur notre page Facebook (Spirale — Magazine culturel).

« NOUVEAUX ESSAIS SPIRALE »

C’est avec grand plaisir que nous avons participé au lancement du plus récent titre paru dans la collection « Nouveaux Essais Spirale » aux Éditions Nota bene : Ce que dit l’écorce, de Nicolas Lévesque et Catherine Mavrikakis. L’essai, lancé le 20 février dernier à la Librairie Gallimard, a reçu un accueil des plus enthousiastes, tant des lecteurs que de la critique. L’enregistrement de la table ronde, animée par Frédérique Bernier, est maintenant disponible sur le site radiospirale.org. Mentionnons également que nous attendons avec impatience le prochain essai de Ginette Michaud : Jacques Derrida. Écrire à contretemps. Le livre doit paraître cet automne.

DANS NOTRE PROCHAIN NUMÉRO

Ces dernières années ont vu une présence nettement accrue des auteurs canadiens-anglais publiés en français. Cela s’observe notamment dans les deux pôles principaux de la francophonie, la France et le Québec. Le dossier « La littérature canadienne en question(s) » (no 249, été 2014), sous la direction de Daniel Laforest et de Maïté Snauwaert,veut entre autres rassembler les points de vue et les lectures afin de suggérer une transformation nécessaire des discours critiques sur la littérature au Canada. Bonne lecture !